Dry January / Tournée minérale

Perso je ne bois que rarement. Trois quatre fois par ans et que des bons vins (pas d'alcools forts). Pour les fêtes et mon anniv'. Le reste du temps je suis à l'eau. Pour moi, ça tombe bien sur mes quatre occasions de picolle annuelles, il n'y en a pas en février, donc ça restera dry.

Mais sur le fond je suis assez d'accord avec l'idée que le bénéfice d'une période d'abstinence de ceci ou de cela, limitée dans le temps, ça n'a pas de grand intérêt si ça n'est de se souvenir que tel ou tel truc n'est pas génial pour la santé. La journée sans tabac par exemple est une ânerie sans nom (bénéfice pour la santé zéro). C'est quand la journée sans sel? Ou le mois sans galipette ?

Hummm... 21 jours pour changer une habitude en déprogrammant/reprogrammant le cerveau?

Mmmouais... Vu le mal que les gens ont pour arrêter de fumer ou le mal que les alcooliques ont pour arrêter vraiment, je doute que ce soit si simple. Si c'était si efficace que ça les services d'addictologie auraient de bien meilleurs résultats. Les approches neuroscientifiques et comportementales ils connaissent... Moi-même quand j'ai arrêté de fumer, je rêvais encore que je fumais de temps en temps un an après! On est bien au-delà des 21 jours. Et je ne suis pas tout seul dans ce cas.

Alors 21 jours ça me laisse pantois. Ou alors 21 jours c'est ce qu'il faut pour modifier des habitudes anodines et sans gravité... Et dans ce cas, si elles font plaisir, sans poser de problème, on peut se demander à quoi ça peut servir de chercher à y renoncer, non?

Honnêtement je suis assez prudent avec la façon dont les recherches en neurosciences sont menées et rendues publiques car ils utilisent beaucoup la corrélation statistique comme preuve là où il ne devrait s'agir que de débuts d'hypothèses à vérifier empiriquement. En outre sur la base d'une corrélation, ils posent souvent que A est forcément cause de B par choix. Parce qu'en réalité une simple corrélation statistique sous entend également que B pourrait aussi être cause de A ou que A et B pourraient être conséquences d'une cause C inconnue, ou que A et B soient causes contingentes associées d'une caractéristique C non prise en compte et portée par l'échantillon étudié... Donc tu vois qu'une corrélation peut être au moins interprétée de 4 manières différentes (voire plus) sans preuves empiriques. Et j'oublie les corrélations accidentelles car comme ces recherches se basent sur des corrélations ou sur représentations statistiques d'un écart type, ça n'exclue pas la corrélation accidentelle qu'on ne retrouvera pas avec un autre échantillon.

Deux chercheurs avaient publié il y a quelques années un article démontrant que 90% des recherches publiées actuellement posaient de gros travers méthodologiques et ne pouvaient pas être considérées comme fiables, d'autant qu'il y a aujourd'hui de moins en moins de recherche indépendante. Soit les labos veulent prouver l'importance des produits qu'ils commercialisent et paient des labos pour le prouver... Soit des "groupes indépendants" aux idées alternatives qui veulent prouver un autre truc mènent leurs propres recherches en voulant eux aussi prouver une hypothèse (en général avec moins de moyens donc avec des échantillons de population de recherche réduits, souvent statistiquement non représentatifs, et souvent sans groupes de contrôles)... Et entre les deux... De moins en moins de labos publics dont l'indépendance des recherches est garantie... D'autant que pour toucher leurs subventions, ils doivent aussi publier des articles à retentissements... ce qui incite à des raccourcis méthodologiques là aussi... En fait on est mal barrés et je crois de moins en moins en la science (officielle ou pas) pour connaître la vérité vraie sur quoi que ce soit !

De fait les trucs qui sont présentés comme un peu magiques comme 21 jours suffisent pour reprogrammer ses habitudes... ça me laisse assez méfiant.

Il y a beaucoup de sujets sur cette question sur la toile... Mais sur la toile il y a aussi beaucoup de conneries... Et des journalistes ont même réussi à démontrer qu'en payant pour publier une étude bidon dans une revue scientifique indienne, par le biais des recensions, ils étaient parvenus à faire reprendre leur article sur le fait que le chocolat faisait maigrir dans toutes les revues scientifiques les plus sérieuses du monde occidental!

Lors d'une recherche sur les "addictions au jeu vidéo/internet" chez les jeunes, j'ai étendu mon domaine d'intérêt à la "dépendance au porno sur internet" et j'ai découvert la communauté des "NoFap". C'était très amusant intéressant! Ils prétendent en effet eux aussi qu'en s'abstenant du combo porno/branlette pendant un temps donné, ils purgeaient leur cerveau (à défaut de... non je sors...) etc... Leurs sites proposent un test d'évaluation à la dépendance au porno... Non validé scientifiquement... et dont les items évaluent plus le niveau de culpabilité des gens que la réalité quantitative de leur pratique d'autant qu'ils n'ont pas non plus fixé de seuil objectif du nombre de fois où il faut se donner du plaisir tout seul sur son ordi pour être considéré comme dépendant! La majorité des témoignages ne décrivaient pas des situations cliniques de dépendance (avec des comportements envahissants altérant le quotidien relationnel, professionnel ou le rapport des gens à la loi) mais juste le fait qu'ils n'étaient pas à l'aise avec le fait de passer "trop de temps" (mais on a jamais su combien de temps en réalité) à leurs pratiques solitaires... J'étais effaré de voir comment ces gens mélangeaient du blabla pseudoscientifique pour s'auto justifier dans leurs démarches. Et comment ils attribuaient au visionnage de porno toutes les misères et insatisfactions de leur vie sexuelle... qui n'était pas franchement forcément géniale avant mais... chuttt!

Cela étant on a le droit de vouloir renoncer au porno pour des raisons éthiques... ça ne me pose pas de problème. L'exploitation commerciale de la sexualité... Le fait que d'avoir des rapports sexuels pour de l'argent reste toujours une forme de prostitution toussa toussa... OK... pas de problème. Mais il faut reconnaître que c'est pour des raisons éthiques et ne pas en faire un pseudo problème médico-psychologique notamment lorsqu'on ne présente pas de réel "trouble envahissant du comportement sexuel" (j'invente le terme je ne me souviens plus de celui qui est repris dans le DSM5).

Concernant l'addiction au jeu vidéo des ados... On se rend compte que là encore on tend à inverser le lien de cause à effet. Quand on prend la peine d'écouter ces jeunes on se rend compte qu'ils ont plein de "bonnes" raisons pour se détourner de leur réalité (souvent très douloureuse et décevante) pour se réfugier dans le jeu. Ce n'est pas le jeu qui les coupe du monde. C'est la vie qu'ils mènent qui les fait fuir dans le monde virtuel. Le phénomène des ikikomoris (plus trop sur de l'orthographe) au Japon est édifiant à ce sujet.

Bref... quand on est pas dans la pathologie... le rapport que l'on entretient au plaisir c'est toujours un truc personnel dont on doit se débrouiller en fonction de qui on est. Il est vrai que pour certaines personnes se priver de quelque chose pendant un moment, donne plus de valeur à la chose et la rend plus agréable quand on la retrouve. On a l'impression de mieux l'apprécier. Pourquoi pas. Pour d'autres on ne fera pas de pauses, mais on consommera avec parcimonie... Pour d'autres on jouera avec les limites en essayent de rester du bon côté... Peu importe du moment que tout le monde s'y retrouve!